Pays
de Galles 2016
Fin
juin, Pierre (voir : Le
col du Soufre),
de retour du Qatar, m'appelle et me propose une sortie vélo fin
août. Depuis le temps que nous voulions partir ensemble !! Deux
jours plus tard, nous passons chez Franck, pendant un match de foot
de l'euro 2016 sans véritable intérêt, et nous lui proposons six
jours à vélo au Pays de Galles. Il nous dit "oui"
immédiatement. Le projet est né. C'est facile....
Jour
-3 : Franck est en forme, il est affûté depuis des mois !!
Pierre a fait pas mal de vélo au mois de juillet, quant à moi, j'ai
couru trois fois, pas de vélo du tout. J'espère que ça ira quand
même. Il s'agit, tout de même, d'effectuer 555 km en six jours avec
des sacoches!!. Je n'ai jamais fait ça de ma vie. Je ne suis pas
inquiet. J'ai confiance en mon corps robuste !! Il en faut plus pour
abattre un Franc-Comtois... Il parait, tout de même, qu'on en
bave le troisième jour...
Jour
-2 : Je me rends compte que mon porte bagages Décathlon ne se
fixe pas sur mon vélo Décathlon. Embêtant deux jours avant le
départ.... Je file dans toutes les boutiques de deux roues aux
alentours et je trouve finalement un porte bagages qui se fixe sur
l'axe de la selle et deux belles sacoches bien rouges. Charge
maximale : 9 kg. Va falloir limiter les tee-shirts.
Jour
-1 : Franck est malade, problèmes intestinaux, consultation
chez le médecin. Pierre récupère son fourgon aménagé. Mes deux
compagnons de voyage sont prêts : le vélo, les bagages. Pas moi.
J'ai du retard. Je teste finalement mon vélo pour la première fois
à 17h avec la totalité du chargement. Je parcours 3 km sans pépin
apparent. Il faut dire que je compte sur Pierre, grand spécialiste
vélo, en cas de problème. Franck, lui, sera notre spécialiste
camping, et gastronomique. Sa spécialité : les pâtes cuites sur un
réchaud et la vaisselle lavée dans les rivières.
Jour
J (ou jour 1) : 1 heure, Le klaxon retentit dans la rue.
Pierre et Franck sont là, avec le fourgon. J'ai dormi deux heures.
C'est extraordinaire. L'aventure commence à l'instant. Nous
chargeons mon vélo, les sacoches. Tout rentre. L'excitation est à
son comble mais Franck n'a pas la grande forme malgré les
médicaments. Je m'installe à la table. C'est un rêve de gosse de
voyager dans un camion aménagé. Nous sommes aux anges, les trois
ensemble, dans ce camion. Malgré le manque de sommeil, il est
impensable de fermer l'oeil une seule seconde.
Nous
arrivons à Calais vers 5h. Nous traversons la "jungle de
Calais". Des grilles de chaque côté de la route, des voitures
de police ici et là. C'est assez impressionnant. Nous nous garons
sur le parking réservé aux camping-cars. J'ai déjà vu des parking
plus.... accueillants. Ca sent l'urine à plein nez. C'est une zone
de transit. Et j'aime bien les zones de transit. Nous sommes
fatigués, mais conscients de commencer une belle aventure.
Petit
tour sur la plage. Première prise de contact avec la nature avant de
nous reposer deux heures avant d'aller embarquer à quelques
centaines de mètres pour l'Angleterre.
Installation
pour quelques heures.
L'avantage
d'être grand et costaud, c'est qu'on bénéficie d'une banquette
pour soi. Un privilège.
Ca
y est. C'est l'heure. L'ambiance est beaucoup moins glauque de jour.
Il fait beau. L'immense plage donne un petit air de vacances. Sinon,
Pierre ronfle, c'est une certitude.
Direction
embarquement. Nous retraversons une partie de "la jungle de
Calais" encore plus impressionnante de jour et nous montons à
bord du ferry.
Il
fait frisquet sur le pont. Ces bateaux sont monstrueux. La moindre
manoeuvre est fascinante à observer. Les appareils photos commencent
à chauffer. J'entends les rafales de Pierre. Ca mitraille dur. Le
temps se gâte un peu. Vent, averses. Ca nous donne un avant goût de
ce qui nous attend pour la suite.
Les
côtes anglaises. La blancheur des falaises de Douvres tranchent avec
le ciel grisonnant. Magnifique. Difficile de prendre des photos. Ca
souffle énormément et les averses nous obligent à nous mettre à
l'abri.
Le
port de Douvres. Tout est gigantesque.
Nous
sortons du port et nous roulons, à gauche, sur les routes anglaises.
Pierre assure, malgré la fatigue. Les routes sont saturées autour
de Londres. Beaucoup de bouchonne. J'aurais bien aimé faire une
halte à Stonehenge mais il vaut mieux arriver tôt au camping pour
bien préparer notre périple à vélo. Premier arrêt essence. C'est
la fête dans la station service. C'est surréaliste. Trois filles,
embauchées par Esso, assez mignonnes d'après l'avis général,
dansent vers les pompes à essence, il y a un DJ devant le parking et
une sorte de magicien. On se demande ce qu'il se passe. Pierre
descend du camion pour faire le plein et quelques secondes plus tard,
les filles se précipitent sur lui. Sur un tube des années 90, le DJ
annonce au micro que nous vous gagné un chèque de 60 euros. Séance
photos... C'est assez incroyable. Voilà un excellent départ ! Notre
petit voyage commence très bien ! Ce court arrêt, en plus de nous
faire faire des économies, nous donne une pêche d'enfer.
Le
temps ne s'améliore pas du tout. Le vent est de plus en plus
violent. L'un des deux ponts menant au Pays de Galles est fermé à
cause de la météo. Nous commençons à réaliser que ça ne va pas
être simple de pédaler dans ces conditions là.... Nous arrivons
enfin au Pays de Galles. Cette contrée paraissait lointaine et
finalement nous y sommes parvenus en quelques heures. Nous nous
rendons compte que ce pays est très vallonné. Ca grimpe et ça
descend sans arrêt. Les départementales sont bordées de haies qui
donnent un certain charme au paysage mais qui enlèvent toute
visibilité. Aucun moyen de s'arrêter sur le bas côté. Tous les
champs sont délimités soit par des haies soit par des murets.
17h.
Nous arrivons au camping de Llangorse après 760 km de route.
Quelques éclaircies donnent un joli dégradé de verts aux champs
environnants. Mais les polaires et les Gore-tex sont de rigueur. Il
faudra compter sur le vent durant ces six jours. Très bon accueil à
l'office du camping. Nous pouvons laisser le camion jusqu'à notre
retour, dans cinq jours, pour un prix très intéressant. Nous
préparons les vélos pour notre première sortie officielle à
trois. 5 km vers le lac de Llangorse.
Paysage
de bocage typique de la région : des collines, des haies délimitant
les champs, de grandes bâtisses en pierres apparentes. C'est
charmant.
Il
n'y a personne. L'office qui loue les barques, les pédalos et autres
embarcations est fermé pour cause de vents violents.
Retour
au camion. Préparation de la journée de demain autour d'une bière,
de rondelles de saucisson et de gâteaux apéros achetés dans la
boutique du lac. Environ 90 km pour notre premier trajet. Nous
n'avons pas fait ça depuis un an et demi, et encore, c'était sans
sacoche. La météo n'est pas bonne pour les deux journées à venir:
Pluie et vent, sans surprise. Nous louerons une chambre dans un Bed &
Breakfast (la mort dans l'âme) si les conditions sont vraiment
exécrables. La route ne devrait pas être trop dure d'après Pierre.
Mais les 30 derniers kilomètres effectués en fourgon sur les
petites départementales nous laissent à penser que ce ne sera
jamais plat. Nous verrons bien. La bière est fraîche et le
saucisson est bon.
Il
est à peine 21 heures et nous nous couchons dans le fourgon pour une
dernière nuit au chaud et à l'abri. Nous sommes heureux d'en
découdre, enfin. Mais les 90 km, chargés, avec le vent et la pluie
laissent planer une légère appréhension... Sans un poil
d'inconscience, nous ne serions pas ici.
Jour
2 :
Ca y est, nous y sommes. Après une nuit agrémentée de quelques
ronflements dus sans doute à la fatigue, nous prenons un petit café,
des morceaux de brioche et nous préparons nos vélos dans un
brouillard humide. La pluie a cessé mais elle n'est pas loin.
Frais,
dispos et souriants, nous sommes prêts. Il est 7h.
Arrêt
obligatoire vers notre première Red
telephone box bordant
un joli cimetière. J'adore les cimetières (voir : Les
cimetières ).
Arrêt
café, chocolat chaud et barres chocolatés dans le Spar d'une
station service. Un vrai réconfort après deux ou trois heures
passées dans la fraîcheur matinale. La pluie nous a épargnés pour
l'instant. La route a été très agréable. Les haies nous ont
protégés du vent et la circulation a été quasi nulle. C'est
l'avantage de partir tôt.
Nous
devons faire attention à notre état de santé. Il faut tenir six
jours et rentrer en vie. Nous devons nous appliquer la règle des
trois "F" comme sur un bateau ou en montagne (Froid, Faim,
Fatigue). Pour nous, ce sera Froid, Faim et Foto. Nous n'hésiterons
pas à laisser la part belle à la partie "Foto", enfin
"Photo".
Ce
début de parcours est très agréable. Un vrai plaisir. Les 50
premiers kilomètres sont passés comme une lettre à la poste.
L'absence de circulation nous a permis de rouler côte à côte la
plupart du temps. Arrivée à Llanwrda.
Notre
première pause déjeuner est un vrai plaisir. Les sandwichs au
jambon cru préparés par Franck sont à tomber parterre. Deux
chacun, un luxe... Il faut recharger les batteries car la gérante de
la petite épicerie nous prévient que ça va grimper puis descendre
puis grimper puis descendre, "up and down".
Là,
ça commence sérieusement à grimper. Je suis largué à 200 m de
mes compagnons de route. Je fais la dernière montée au ralenti. Ils
m'attendent au dessus. Franck n'est pas au mieux. Toujours ses
problèmes de ventre. Par contre, il monte les côtes avec une
facilité déconcertante. Pierre, lui, suit sans problème. Ses
sorties du mois de juillet lui sont profitables. J'aurais du
m'entraîner un peu...
Petite
sieste dans le parc de Lampeter. Un pur bonheur. Je m'endors en
quelques secondes. Environ 80 km au compteur. Il en reste environ 20.
Mes adducteurs commencent à chauffer. Toujours pas de pluie.
Nous
effectuons nos derniers kilomètres sous la pluie. Une bonne grosse
pluie. Il est environ 15h et nous arrivons à Aberaeron rincés,
vidés, épuisés. 105 km !! pour le premier jour. Nous apercevons la
mer, premier petit réconfort. Nous nous installons rapidement dans
un pub et Franck s'envoie un fish and chips, Pierre une sorte de plat
gratiné avec des pommes de terre et moi, un hamburger frites. Il
fait bon, il fait chaud et c'est un régal.
Nous
repartons rapidement à la recherche d'un camping. La pluie cesse. Il
faut vite monter les tentes. Deux tentes neuves, une pour Franck,
l'autre pour Pierre et moi. Nous nous installons pour une sieste. La
pluie reprend aussitôt.
Après
deux heures de repos, une bonne douche longue et chaude, nous
repartons en ville à la tombée de la nuit pour un petit gueuleton.
Nous achetons pour le petit déjeuner et les sandwichs du midi.
Dommage que le beau temps ne soit pas de la partie car cette petite
ville balnéaire doit être très agréable l'été avec du soleil.
Nous
nous couchons assez tôt pour être opérationnel à 6h demain matin.
80 à 90 km nous attendent de pied ferme. Ce soir, je ne sens plus
mes fesses ni mes cuisses et mes adducteurs sont douloureux. Il faut
penser à bien s'hydrater. La nuit devrait nous retaper.
Jour
3 : Réveil vers 6h, dans l'humidité. Il a plu une partie de la
nuit. Nous prenons un café et un chocolat chaud dans la station
service située à la sortie du camping. 20 mn de chaleur bien
agréables avant d'affronter à nouveau le vent et la pluie. Nous
devrons rouler l'un derrière l'autre car, sur cette route côtière,
la circulation devrait être plus importante que le premier jour.
J'espère que je serai à la hauteur car, hier, à chaque côte, mes
potes m'ont mis 500 m dans les gencives et sans forcer.
Finalement,
le temps n'est pas si épouvantable que ça. Je m'autorise même à
pédaler en tee-shirt. Mais l'arrivée à Aberystwyth
se fait sous des averses et des rafales de vent. Certaines grosses
vagues arrosent les touristes qui se promènent sur le front de
mer. Cette ville côtière est très agréable avec les ruines
du château construit par les Normands, sa balade le long de la mer,
ses façades, les collines environnantes. Elle mériterait un beau
rayon de soleil.
Nous
nous enfilons dans un pub bien chaud pour nous offrir un bon plat de
pâtes qui tient au ventre. Nous sommes trempés. Cette petite heure
au sec nous requinque complètement. Je découvre ce que sont les
pubs. Je ne m'attendais pas à ça du tout. Franck nous avaient
prévenus que c'étaient des endroits fréquentés par les familles,
du bébé à la grand-mère. Et c'est exactement ça. Il y a du monde
toute la journée. Les gens mangent à toute heure, salé, sucré,
café, chocolat chaud, bière ... Ce sont des lieux de
bien-être absolu où les gens ont plaisir à se retrouver. Pour
nous, en tout cas, ce sont des refuges chaleureux et toujours très
accueillants. Une aubaine avec cette météo capricieuse. D'ailleurs,
il nous faut un certain courage pour nous extraire de ce cocon
douillet, pour enfiler nos vêtements encore humides et pour monter
sur nos vélos. Mais la route est encore longue et ça va grimper.
Nous démarrons d'ailleurs par une montée démoralisante !
Les
derniers kilomètres se font sous un déluge de pluie. Nous avançons,
la tête baissée. Je fais attention à ne pas glisser sur une plaque
d'égout ou sur des bandes blanches. Les descentes sont dangereuses
ce qui n'empêche pas Pierre d'y aller à fond. Depuis deux jours,
nous avons un rituel en fonction du relief qui se présente à nous :
dans les descentes, Pierre nous prend 500m, dans les montées c'est
Franck qui passe devant, et moi j'essaie de tenir bon entre les deux.
Mais je suis cuit, complètement cuit après 87km assez difficiles.
Mes compagnons de route ont encore l'énergie de parcourir 1 km sur
un petit chemin pour chercher un camping à l'entrée de Dolgellau.
Je les attends pour savoir si l'emplacement convient ou non. Et puis,
au bout de quelques minutes, je pars les rejoindre malgré mes jambes
lourdes et mon degré de fatigue. Je veux faire les mêmes efforts
qu'eux !! Finalement, le camping est trop excentré. La gérante nous
en conseille un autre plus proche du centre ville. Nous reprenons nos
vélos et effectuons nos derniers mètres au courage. L'endroit est
parfait. L'accueil est chaleureux, comme toujours. Nous plantons nos
tentes et prenons une douche. 30 mn de douche chaude. La meilleure de
toute ma vie !!!!!
Visite
de la ville dans l'humidité. C'est très joli. Toutes les maisons
sont construites en pierre. Il y a une petite place, un petit pont en
pierre, l'ensemble forme une unité pleine de charme. Nous trouvons
un pub tenu par une dame. Nous sommes seuls. C'est la première fois
depuis notre départ. Il faut dire que nous ne sommes plus en bord de
mer. Nous sommes retournés dans les terres. Les touristes se font
plus rares et, le soir, la vie dans la ville est quasiment
inexistante. Les lasagnes sont délicieuses et le crumble aux pommes
termine parfaitement le repas. Que du léger. Il faut dire que nous
éliminons pas mal sur les vélos et je sais que, demain, je vais
encore perdre quelques centaines de calories alors, nous nous faisons
plaisir ! J'ai perdu un ou deux kilos depuis deux jours. C'est assez
agréable de savoir que l'on peut s'enfiler un crumble aux pommes
après des lasagnes sans prendre un gramme.
Nous
faisons sécher nos habits dans un sèche linge sans les avoir laver,
ce qui est une mauvaise idée. Les odeurs qui s'échappent de la
buanderie ne sont pas toujours des plus accueillantes. Le gérant du
camping, aux joues bien rouges, nous propose de mettre du papier
journal à l'intérieur de nos chaussures et de les faire sécher
vers la chaudière. Il est bienveillant comme tous les Gallois que
nous avons rencontrés le long de la route. Il nous confirme que le
temps sera bien meilleur pour la fin de notre parcours. La pluie
devrait cesser ! Très bonne nouvelle.
Coucher
vers 23h.
Jour
4 : Lever vers 6h, comme d'habitude. Déjà 193km au compteur.
Nous nous apprêtons à parcourir 83 km. Donc, c'est une journée
tranquille. Il fait beau ! La brume se dissipe. Le village dort
encore. Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt. Nos
chaussures sont sèches !! Merci au gérant qui s'est levé pour nous
les rendre. Nous prenons un peu de temps pour nous balader dans le
village et prendre des photos.
La
route est très agréable. Peu de côtes, du soleil. Tout est beau.
C'est un vrai plaisir. Le moral est gonflé à bloc.
Nous
longeons l'estuaire de Mawddach entre Dolgellau et Barmouth. La plus
belle route depuis le début de notre périple. Le décor est
fabuleux.
Arrivée
à Barmouth, petite station balnéaire très appréciée des
touristes anglais.
Nous
n'avons que 15 km dans les jambes et il est déjà tard. Nous avons
effectué de nombreux arrêts photos, histoire de nous rattraper de
la journée d'hier.
Malgré
l'heure avancée, nous passons une heure à nous prélasser sur la
terrasse du Davy Jones Locker Cafe située en face du petit port de
plaisance. Le soleil nous donne de l'énergie pour toute la journée.
Les batteries sont rechargées à bloc. Aujourd'hui, nous avons envie
de nous faire plaisir !!
La
route côtière est magnifique.
Arrêt
au château d'Harlech, forteresse impressionnante du 13ème siècle,
classée au patrimoine mondial de l'UNESCO. Avec Pierre, nous faisons
une visite rapide de l'enceinte.
Depuis
le chemin de ronde, nous dominons la mer et les environs. La vue est
splendide, la forteresse austère à souhait.
Nous
poursuivons notre route.
Mes
jambes semblent s'être mises au niveau. Je force beaucoup moins dans
les côtes et je ne puise jamais dans mes réserves. Par contre mon
genou gauche commence à me gêner. Ca devient problématique. Les
derniers kilomètres avant Caernarfon sont très douloureux. Chaque
coup de pédale me fait mal. Je me demande dans quel état je vais me
retrouver demain matin. En tout cas, je ne pourrai pas faire 90 km
avec cette douleur.
Caernarfon,
c'est beau et ça nous plaît. Le château est l'un des plus
impressionnant que je connaisse. Vite, trouvons un camping assez
proche, installons-nous rapidement pour revenir immédiatement
visiter la ville !!! Je suis impatient de ma balader dans les rues et
de voir cette forteresse du 13ème siècle.
Il
aurait fallu éviter la douche et visiter la forteresse tout de suite
car ses portes sont fermées. Pourtant, il est encore tôt. Je suis
un peu dégoûté car une forteresse comme celle-là, on n'en
rencontre pas tous les jours. Bref, nous nous voyons obligés de nous
asseoir à une terrasse au soleil pour vider une pinte de bière.
Nous y restons une bonne heure à faire le bilan de notre première
partie du voyage. La bière descend toute seule. Nous sommes en
vacances et nous avons la fin d'après-midi à ne rien faire de
particulier si ce n'est boire, se balader, discuter et manger.
Pendant
notre discussion, je fais savoir à mes camarades que ce n'est pas
toujours drôle d'être 200m derrière eux et que je pensais rouler à
côté d'eux, en discutant, comme au cours du premier jour, un truc
sympa quoi ! Là, ça n'est plus trop le cas. J'aurais sans doute du
m'entraîner davantage pour être à leur niveau. En plus, mon genou
m'a fait très mal pendant les cinq derniers kilomètres. Sans doute,
une tendinite du à un excès brutal de vélo et à un manque
d'entraînement préalable. Le vélo, c'est leur truc. Pour moi, ça
n'a jamais été un plaisir. Le vélo pour le vélo, ce n'est pas
pour moi. Et, pédaler à 200 m derrière, c'est pas drôle. Pierre
me dit, avec raison, que si j'étais en meilleure forme, je prendrais
du plaisir. Mais il faut quand même aimer pédaler... Bref, demain,
il faudra trouver une pharmacie pour me procurer un anti-
inflammatoire. Mes coéquipiers sont en forme. Franck va beaucoup
mieux. Ses intestins le laissent tranquille. Les vélos sont toujours
en état. Les sacoches tiennent le coup. Le bilan est positif.
Il faut que le genou tienne. J'ai la pression. Je ne voudrais surtout
pas être un boulet sur la fin de parcours. Ils m'en voudraient
peut-être (sûrement) de ne pas m'être entraîné.
Balade
dans la ville.
Ci-dessous,
le plus petit bar du Pays de Galles.
Balade
au soir tombant après un fish and chips.
Retour
au camping.
C'était
la plus belle journée. Magnifique du début jusqu'à la fin et pas
trop difficile. Celle de demain s'annonce autrement plus coriace.
Jour
5 : Lever vers 6h. Départ 7h. Nous sommes habitués. Il fait
bon. Nous aurons une belle journée. Dure mais belle. 97 km prévus,
de jolis côtes dans le Snowdonia Park dont le Lianberis Pass
(350m).
Premier
arrêt vers une ancienne station service.
Mon
genou me fait mal. Nous trouvons une pharmacie à Lianberis.
J'achète une genouillère et des anti-inflammatoires.
Petite
halte dans un pub. Chocolat chaud, café, gâteaux dans une ambiance
et un décor extrêmement sympathiques.
Ca
y est. Nous sommes dans le dur. Nous traversons le Snowdonia Park. Ca
grimpe mais le paysage est somptueux. Franck est 500m devant. Mon
genou n'est plus douloureux. J'arrive à monter sans trop forcer. Je
me sens de mieux en mieux sur le vélo. C'est le quatrième jour.
Pierre nous avait prévenu que lors du quatrième jour, tout irait
mieux. Moins de douleur, plus de facilité... C'est mon cas.
Petit
bilan en haut du col. Je laisse mes compagnons de route gérer la
situation. Je ne suis pas du tout habitué à me laisser guider mais
là, c'est le cas. Je ne regarde quasiment pas les cartes et je les
laisse décider des options à suivre. Je mets juste mon veto quand
j'entends trop souvent " ça va être chaud" ou " ça
va grimper"...
Swallow
Falls
Franck,
notre spécialiste camping, vaisselle et pâtes cuites sur un
réchaud, nous prépare donc des pâtes cuites sur un réchaud. Cela
fait déjà plusieurs jours qu'ils nous en parle. Il en mourait
d'envie. Là, ce midi, il se fait plaisir. Regardez ce sourire. Il
est dans son élément.
Effectivement,
ce sont les meilleures pâtes cuites sur un réchaud du monde. Elles
nous font un bien fou.
Mais
Pierre repart difficilement. Il ne digère pas le petit sandwich à
la rosette avalé juste avant les pâtes.
Dur
dur pour Pierre. Côte à 13%.
Les
paysages sont magnifiques.
Heureusement
pour nous, les derniers kilomètres sont faciles. Nous roulons à
vive allure en nous relayant. J'ai la pêche. Nous retrouvons notre
camping de Dolgellau. Ils ont rajouté une belle table en bois rien
que pour nous ! Gros apéros bien mérité. Nous formons une belle
équipe même si je me demande quelle est mon utilité dans le groupe
puisque je ne gère ni l'itinéraire, ni les repas. Je ne suis
spécialiste en rien de ce qui nous est demandé pendant ce périple
(vélo, camping....). Je prends mes potes en photo, c'est déjà pas
mal.
Pas
besoin de dessins pour expliquer à quel point nous savourons ces
moments.
Jour
6 : Il est 6 heures. Nous nous apprêtons à quitter ce camping
pour la deuxième fois. Je pense que c'est notre camping préféré.
Nous avons lavé notre linge. Il est propre et sec. 90 km sont prévus
au programme pour notre avant dernière étape.
Grosse
côte pour commencer. C'est dur mais j'ai la pêche. Plus rien ne me
fait peur ! Mes jambes sont affûtées !
Arrêt
café cake.
La
route n'est pas passionnante. Nous roulons assez vite. Repas du
midi préparé par notre chef. Pâtes à la sauce tomate.
Pause
à Llanidloes.
Puis,
nous arrivons à Rayadher. Petit village avec un camping fort
sympathique. Il y a même une table qui nous tend les bras.
Au
bout de quelques minutes, un Anglais vient nous demander de l'aide
pour monter sa tente. Il est seul avec son fils et il a une immense
tente qui pourrait contenir les deux nôtres avec nos vélos et la
table en bois. Cette tente à monter est un véritable sketch à
filmer. Le fils joue sur son téléphone dans leur camionnette. Il ne
lèverait pas le petit doigt pour nous aider. Le père ne sait pas
planter un piquet. Rien ne tient. Les tiges sautent dès qu'on les
lâche. Avec la fatigue, un extraordinaire fou rire nous prend. Je
n'arrive plus à planter le moindre piquet. J'en suis réduit à
m'allonger parterre. Je n'ai plus de force du tout. On sent l'Anglais
étourdi et pas pragmatique pour deux sous. Il a un rire hyper
communicatif. Il transpire à grosses gouttes. Je n'ai pas ri comme
ça depuis bien longtemps. Il nous paie une bière pour nous
remercier d'avoir planter sa tente mais aussi pour les 20 minutes de
fou rire. Pourtant, nous ne savons pas si cette tente tiendra la
nuit.
Franck
assouvit un autre fantasme : faire la vaisselle dans une rivière.
Nous
terminons cette belle journée au pub. Nous retrouvons des motards
installés dans notre camping. Ils nous demandent ce que l'on pense
du breack site. Ils ont l'air aussi heureux que nous, entre potes,
avec leur pinte de bière bien fraîche.
Whisky,
Baileys, bière, lapin, frites.... Nous profitons de notre avant
dernière soirée ensemble.
Jour
7 : 6h30 - Petit déjeuner complet dans la rosée. Pour la
première fois, nous partons sans les sacoches. Programme du jour :
petite boucle dans la Elan Valley Reservoirs avant de revenir prendre
nos affaires au camping pour rentrer à Llangorse, notre destination
finale.
La
Elen Valley Reservoirs est, de loin, la plus belle route de notre
voyage. Il est 8h et la lumière est splendide. A la sortie de chaque
virage, nous nous attendons à une surprise : un pont, un lac, un
mouton, un barrage... C'est un enchantement.
Premier
barrage.
Deuxième
barrage.
Troisième
barrage.
Le
paradis
Au
sommet, pas un arbre. La surface est pelée par le vent. Cela me
rappelle les premiers plateaux du Kirghizistan (voir Kirghizistan
2015 ).
Nous
grimpons notre dernier véritable col (485m). Pas facile mais, après
cinq jours de vélos, j'ai la forme. La descente nous ramène dans la
vallée de Rhayader.
Nous retrouvons les paysages traditionnels.
Nous
récupérons nos affaires au camping puis nous reprenons la route
après une courte visite de Rhayader.
La
route est beaucoup moins enthousiasmante que ce matin. Nous roulons
fort. Dernier repas. Pâtes.
Nous
terminons notre parcours à toute allure alors que nous vivons nos
derniers coups de pédales ensemble. C'est assez paradoxal. Mais la
route n'a rien d'intéressant et nous souhaitons arriver tôt pour
profiter de l'après midi au soleil.
Retour
à notre premier camping. A l'accueil, la dame ne donnait pas cher de
nos chances quand elle nous a vus partir cinq jours plus tôt avec
une météo désastreuse. C'est tout fiers, que nous nous présentons
à elle. 555km !! En six jours !! C'est tout de même un petit
exploit surtout pour Pierre et moi. Franck pourrait enchaîner sans
problème avec le Mont Ventoux.
Nous
nous offrons une bonne heure de terrasse au soleil, vers le lac. Nous
faisons les comptes (surtout Franck). Le voyage ne devrait pas nous
revenir à plus de 300 euros chacun.
Nous
nous sentons bien. Soulagés d'avoir réussi notre petit tour sans
pépin, fiers d'avoir accompli un petit exploit, contents d'avoir
perdus quelques kilos et ravis d'avoir tenu notre budget.
Le
camion est toujours là. Rédaction du carnet de voyage, douche,
bière. Dernier pub à Brecon.
Petit
café et au lit.
Jour
8 : Lever 4 heures. Départ 5 heures. J'aimerais visiter
Stonehenge mais nous craignons les bouchons vers Londres donc ce sera
pour une autre fois. Pierre adoooore conduire son camion. Malgré la
fatigue accumulée, il enchaîne cinq heures de conduite sans
broncher. Franck retrouve sa position favorite.
Nous
arrivons à Douvres vers 10h, largement en avance. Nous avons
quelques heures pour nous balader vers les magnifiques falaises
blanches de
Saint Margaret’s.
Douvres
et sa forteresse
Visite
de la forteresse. Le château de Douvres est le point d'Angleterre le
plus proche du continent. La place était sans doute déjà occupée
dès l'âge de fer. Les Romains y avait installé un phare (toujours
visible), les Saxons une église. Guillaume le Conquérant a ensuite
étendu les fortifications en 1066 et Henri II en a fait le château
actuel (de 1179 à 1188) en ajoutant le donjon entouré d'un
mur d'enceinte.
Le
château a toujours eu un rôle militaire important à travers les
siècles. Une série de tunnels abritaient un hôpital et des
quartiers généraux pendant la seconde guerre mondiale. C'est aussi
depuis ce site que l'opération "Dynamo" (évacuation de
350 000 hommes encerclés par les allemands à Dunkerque en 1940) eu
lieue. Les deux dernières transformations des défenses du château
furent entreprises pour lutter contre les éventuels débarquements
de Napoléon et d'Hitler.
Aujourd'hui,
des comédiens en costumes nous font revivre le passé. Différentes
époques sont revisitées. Les diverses animations, musique, cuisine,
jeux, ... agrémentent la visite.
Ce
qui est frappant, c'est le paradoxe entre l'austérité des bâtiments
et les couleurs des meubles et des ornements. Il y avait de la
couleur au Moyen Age !! L'intérieur est presque chaleureux.
Vue
depuis le sommet du Donjon. Ci-dessous, sur la photo de droite, à
l'arrière plan, l'église et le phare romain, l'un des mieux
préservés d'Europe.
La
visite est terminée. Nous nous dirigeons vers le port pour
l'embarquement. Ca sent la fin. Nous sommes encore sous le charme du
Pays de Galles. L'aventure se termine et nous le ressentons. C'était
formidable nous trois, ensemble, à vélo au pays de Galles.
Cette
traversée est un peu tristounette. Nous nous offrons tout de même
un bon plat chaud à bord du ferry.
L'arrivée
à Calais. Nous contournons la longue jetée fréquentée par de
nombreux pêcheurs. J'ai l'impression que nous la survolons en
hélicoptère.
Nous
reprenons la route jusqu'à Paris. Après une ou deux heures plutôt
calmes, nous sortons les bières, nous montons le son tout en
regardant les photos sur le pc. Nous chantons à tue-tête tout ce
qui passe à la radio. Pierre contrôle le volant avec les genoux, se
roule une clope tout en visionnant les photos et son GPS. Il arrive
aussi à boire en même temps !!
Notre
petit délire nous ramènent rapidement à notre point de départ :
Paris, l'Esonne, Evry, Corbeil... Il est plus de 21h. Ahhh, vivement
la prochaine virée.
Le
lendemain, Pierre se rend compte qu'il a oublié son passeport dans
une station service près de Calais. Il fera l'aller-retour, deux
jours plus tard, pour le récupérer avant de repartir au Qatar.
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